Arrivé à la tête du Stade de Mbour en décembre 2020, le président El Hadji Amadou Wade dit «Ass Wade» traîne un boulet de canon en fin de mandat. Son club est relégué en Ligue 2 par la fameuse décision prise vendredi dernier par la Commission de recours de la Fédération sénégalaise de Football (FSF). Mais le dirigeant assure que son club épuisera toutes voies de recours pour rester dans l’élite locale.
Entretien.
En tant que président du Stade de Mbour, comment avez-vous accueilli la décision de la Commission de recours de la Fédération sénégalaise de Football avec comme conséquence la relégation de votre club ?
Nous avons accueilli cette décision avec beaucoup de sérénité, parce que, de toutes façons, on a le droit avec nous. La Commission de recours s’est fourvoyée. Elle n’a pas dit le droit. C’est le bon terme. Maintenant, comme n’avons plus d’autres voies de recours au niveau national, nous sommes en train de constituer le dossier. Nous allons saisir le Tribunal arbitral du Sport (TAS). Il n’y a pas besoin d’être juriste pour comprendre certaines choses. Il suffit juste de pouvoir lire les textes. De toutes façons, même la dérogation qui a été faite pour les licences amateurs concerne les petites catégories. Mais pour les seniors, les amateurs et les professionnels, c’est la même date. Il y a une circulaire qui fixait le démarrage de la saison au 30 septembre 2023, la date de fin de saison le 15 juin 2024. Elle disait que la première période d’enregistrement et de transferts internes des joueurs professionnels et amateurs était du 31 juillet 2023 au 20 octobre 2023. La deuxième période du 1er février 2024 au 1er mars 2024. Ensuite, le 9 novembre, une circulaire est sortie pour dire que suite à la forte demande des Ligues de football et des clubs, la fédération porte à la connaissance des acteurs que la première période d’enregistrement est prolongée jusqu’au 24 novembre pour les joueurs des catégories juniors et cadettes. Ensuite, le même jour, on dit : suite au retard enregistré dans la délivrance des licences, la première période d’enregistrement est prolongée jusqu’au 24 novembre à minuit pour les catégories seniors, juniors, cadets et minimes des clubs amateurs et, pour les catégories des joueurs juniors, cadets et minimes pour les clubs professionnels. Ça veut dire que les dates des licences seniors n’ont pas changé. Donc, si tu as un joueur professionnel, tu vas l’enregistrer en professionnel dans la deuxième fenêtre. Si tu dis que tu l’as enregistré dans la première période, qui est la même pour les professionnel et les amateurs, pourquoi lui avoir trouvé une licence amateur alors qu’il pouvait avoir une licence professionnelle ?
Pourquoi vous dites que la Commission de recours de la FSF n’a pas dit le droit ?
Malheureusement, c’est ça. Ce qui est plus clair, c’est que la Commission de discipline de la Ligue a demandé des textes et le Secrétaire général de la Fédération sénégalaise de Football lu a envoyé un courrier le 29 avril 2024 portant la transmission d’une capture de la plateforme FIFA Connect que le joueur Ababacar Sarr de l’ASC Jaraaf a évolué sous les couleurs de cette équipe de la période du 16 novembre. Le 16 novembre, c’était déjà fermé. Parce que c’était fermé le 20 octobre. Donc, du 16 novembre au 12 février et qu’après ça, il a eu un contrat professionnel dans la deuxième phase pur avoir une licence professionnelle. Donc, dans la période du 16 novembre au 12 février, il a évolué au Jaraaf sous les couleurs amateurs. Ça veut dire que la licence a été enregistrée hors délai. Donc, pour nous, il n’y avait plus de discussion. Maintenant, dans les PV de la Commission de recours, celle-ci n’a cité aucun règlement de la fédération, aucun règlement de la Ligue ! Ils ont juste dit qu’on a demandé à la personne par laquelle on a soupçonné que la fraude est parvenue. Ils ont convoqué cette personne pour lui dire : est-ce que tu as fraudé ? Elle a dit je n’ai pas fraudé. L’informatique ne met pas. La Commission de discipline a reçu les archives qui disent que la licence a été faite le 16 novembre. Donc, il n’y avait pas matière à débattre. Pour moi, la Commission de recours a dit ce qu’elle voulait dire. En tant que membre du Comité exécutif de la fédération, j’ai honte de cette situation. Dans leurs interprétations, beaucoup de gens, même dans mon club, attaquent la fédération. Mais ce que je dis, dans tout système, il y a des failles. Quand on décèle une faille, il y a des arguments juridiques pour nous rétablir dans nos droits. C’est pourquoi je ne vais pas crier, ni polémiquer. J’ai déjà commis un avocat. On est en train de préparer le dossier. On va saisir dans les délais, le Tribunal arbitral du Sport (TAS). Et, on va demander que le classement du Championnat soit gelé jusqu’à ce que le TAS rende une décision.
Vous semblez très confiant en parlant de saisine du TAS…
On est confiant, sûr d’avoir le droit avec nous. On ira au TAS en nous disant que si le droit est dit, quel que soit le tribunal qui juge cette affaire, le Stade de Mbour reste en Ligue 1. Le Stade de Mbour n’a rien à craindre. Si le droit est dit, nous passons. Si le droit n’est pas dit, ce n’est pas la fin du monde. Même s’il y a 1% de chance pour que nous soyons désavoués, il faudrait qu’on pense à cette éventualité. Ce n’est pas parce que le Stade de Mbour est relégué que le football va s’arrêter ou le Stade de Mbour va disparaître. Si je dis que par force on aura raison, si demain on me donne tort même si j’ai raison, que vais-je dire à ma population ? Donc, comme ça va en justice, on va laisser le TAS faire son travail. Comme la première instance nous a donné raison, la deuxième instance a dit nous avons tort, nous irons à l’instance supérieure et nous accepterons son verdict, parce que c’est nous qui la saisissons. Si je perds là-bas aussi, je saurais que c’est le sport, mais j’aurais utilisé toutes les voies de recours à ma disposition. Dans le sport, il y a victoire, défaite et nul. Dans le sport également, il y a aussi l’éthique et la déontologie. En ma qualité de président de club, je ne m’occupe pas beaucoup d’administration. Il y a des fautes imputables à mon administration, mais je ne vais pas dire par force que ça va bloquer ou bouleverser tout le football. J’assume et je me rectifie pour la prochaine fois. Pour moi, le Jaraaf a fauté et n’a pas voulu le reconnaître. Ils ont trouvé des avocats pour leur dire qu’ils ont raison, alors qu’on sait qu’il n’y a pas besoin d’être juriste pour savoir que le Jaraaf n’a pas raison.
Vous voulez dire que le Stade de Mbour de Mbour est l’agneau du sacrifice dans ce contentieux ?
C’est ce que dit le peuple du Stade de Mbour. Mais moi, je ne suis pas dans ça. Je refuse des considérations du genre on favorise X ou Y, parce que dans les réunions du Comex, ma position va au-delà du Stade de Mbour. C’est une position de sportif, d’amoureux du football qui essaye de se battre pour que ça avance. Si le Stade de Mbour avait fauté, j’allais faire profil bas. Mais je sais que, sur ce cas, le Stade de Mbour n’est pas fautif. La Commission de recours, c’est deux à trois personnes qui se sont réunies pour sortir une décision. Ils sont dans leur droit, parce que c’est nous au niveau du Comité exécutif de la fédération qui leur avons donné ce pouvoir d’être le dernier recours et que leur décision n’est pas susceptible d’appel. À partir de cet instant, on dépasse le national pour aller vers ceux qui dirigent le sport dans le monde. On va emmener nos éléments et demander juste d’être rétablis dans nos droits. Que le club descente ou pas, ce n’est pas un problème. Ce dont je suis convaincu, c’est que les résultats du football, administrativement et footballistiquement, font que le Stade de Mbour doit rester en Ligue 1. Je vais me battre avec toute mon équipe pour ça, sans entrer dans beaucoup de commentaires. Ce n’est pas de ressort d’envenimer une situation, mais je ferai de sorte que justice soit faite. Au vu de tout ce que j’ai comme papiers, de tout ce qui s’est passé, en toute objectivité le Stade de Mbour ne doit descendre en Ligue 2.
Concrètement, quand vous allez saisir le TAS ?
On a trois semaines pour saisir le TAS, mais on le faire dans la semaine ou au plus tard la semaine prochaine. On ne va pas attendre la fin des délais. On a ouvert notre dossier qu’on est en train d’étoffer avec certains éléments. L’histoire de saisir le TAS, il n’y a pas à discuter là-dessus, parce que c’est quelque chose de quasi fait. Maintenant, c’est le mémoire qu’on va déposer au TAS. On est en train de mettre dedans tous les éléments qui nous confortent dans ce que nous affirmons.
Votre club a sorti un communiqué daté du 14 juin pour dire que le football sénégalais ne mérite cette mascarade qui foule au pied les codes et règlements qui gouvernent le football…
Oui, ça c’est plein de choses. Sur l’autre cas qui n’a pas encore été vidé, quand on dit qu’on joueur suspendu moins de trois matchs ne peut pas saisir la Commission de recours sur cette sanction, si la Commission de recours se déclare compétente pour enlever et mettre du surtitre, il y a un problème. Quand on dit dans les textes ou le commissaire ou l’arbitre ou le délégué fait son rapport tu mets en doute le commissaire qui fait son rapport, il y a un problème. Moi, j’aurais convenu des cas compliqués où on fait appel au droit, les gens qui ont dit ceci ou cela. Mais c’est lire des textes que tout le monde comprend en même temps, pour les lire et interpréter en fonction de ça, si quelque chose d’autre est fait, il y a effectivement problème. Et ça, c’est le premier problème qu’on a avec la commission de recours. Quand elle a enlevé le PV N°94 pour dire le joueur est suspendu deux matchs avec sursis, alors qu’elle n’avait pas le droit de faire suspension. Ici, on a puni beaucoup de joueurs deux matchs. Leurs clubs n’ont pas fait appel parce qu’ils ont respecté le règlement. Pourquoi le Jaraaf fait appel et on enlève les deux matchs ? Et l’autre problème, c’est que moi j’aime bien le Jaraaf, j’ai beaucoup de rapports avec eux. L’année passée, après la finale (Ndrl: de la Coupe du Sénégal) ils sont venus nous voir. On a réellement sympathisé et tout. Mais en matière de droit et de justice, il ne faut pas qu’on fasse une entorse pour X ou pour Y. La loi, elle est impersonnelle. Si elle s’applique au Stade de Mbour, qu’on l’applique. Je n’ai pas ce problème. Nous avons fait des fautes et quand on nous a dit que vous avez fauté, on a accepté. Quand d’autres font des fautes et qu’on dise que vous avez fauté, il n’y a pas besoin de remuer ciel et terre ou de tordre les lois. Les lois, une fois qu’on les tord, deviennent flexibles et c’est dangereux pour la communauté.
Par Tidiane NDIAYE
Exergues
«Le Jaraaf a fauté et n’a pas voulu le reconnaître»
«Administrativement et footballistiquement, le Stade de Mbour doit rester en Ligue 1»
«Geler le classement jusqu’à ce que le TAS rende une décision»